A vous de juger à propos de l’accompagnement d’une congrégation religieuse dans son organisation face au vieillissement des moines. Une mission originale pour 2 Ectiens Vendéens dont les compétences et les valeurs humaines sont sollicitées pour mener à bien cet accompagnement.

Pierre LIARD & Bernard MILCENT témoignent

Quand nous avons commencé notre mission en octobre 2019, la Congrégation des moines bénédictins de Notre Dame d’Espérance comptait 110 personnes dans 10 prieurés implantés dans différentes régions de l’hexagone.

Plus de la moitié des Frères avaient plus de 60 ans dont 15 de plus de 75 ans. De plus, le vieillissement se trouve accentué par le fait que cette congrégation ouvre la vie monastique à des personnes en situation de handicaps et de fragilités psychiques.

Jusqu’alors, chaque prieuré, avec l’aide de la psychologue attachée à la congrégation, essayait de trouver, tant bien que mal, des solutions d’accompagnement des Frères les plus dépendants en faisant appel aux services locaux d’aide et de soins à domicile.

A la demande de la psychologue et du Prieur général de la Congrégation, ECTI a été sollicité pour les aider à réfléchir à la mise en place d’une véritable organisation médico-sociale pour que les moines puissent vivre leurs vieux jours dans de bonnes conditions de bien-être et de sécurité. Comme nous étions 2 Ectiens Vendéens à avoir une expertise dans le domaine social et médico-social (Bernard MILCENT ancien psychologue dans le secteur du handicap et Pierre LIARD ancien directeur d’une fédération d’associations d’aide et de soins à domicile) ECTI Vendée s’est engagé dans cette mission.

Il faut cependant noter que la congrégation connaissait bien ECTI car la maison mère située dans la Somme avait déjà passé convention avec ECTI 80 pour des missions d’accompagnement de projets immobiliers.

Une première étape de notre mission a consisté à faire une étude approfondie de la situation dans un prieuré. Nous avons choisi celui de l’abbaye de la Grainetière en Vendée pour sa proximité mais également parce qu’il est assez représentatif des 10 sites.

Pour bien nous imprégner de leurs réalités humaines et de leurs conditions de vie, nous sommes allés passer 3 journées au sein de l’abbaye et avons réalisé des entretiens individuels auprès de 7 moines sur 11 pour bien appréhender la diversité des situations.

En complément, nous avons voulu avoir la perception des intervenants extérieurs en rencontrant les infirmières, les aides-soignantes et les aides à domicile, de même que le Président de l’association des bénévoles qui soutient la communauté.

Pour élargir l’analyse à l’ensemble de la congrégation nous avons étudié sur documents la démographie et la situation des handicaps et dépendances sur les 9 autres sites.

Un rapport de synthèse avec un diagnostic et des préconisations a été remis au Prieur Général et au Prieur de la Grainetière. Nous leur avons proposé des mesures pour permettre le maintien des Frères le plus longtemps possible dans leurs communautés. Mais, pour les Frères dont l’état de santé est fortement altéré nous leur avons recommandé de travailler à la création d’une structure d’accueil plus « médicalisée »

Parallèlement, la congrégation a été à même de reprendre les locaux d’un ancien carmel, appartenant au diocèse de Rennes, en très bon état et disposant de chambres médicalisées. L’emplacement auprès de la maison de retraite des prêtres du diocèse et la proximité de Rennes étaient également 2 atouts supplémentaires.

Après mûre réflexion et débats au sein de la congrégation, cette opportunité a été saisie et il a été décidé d’y créer un nouveau prieuré plus spécialisé dans l’accompagnement des frères fragiles, âgés, dépendants, tout en accueillant aussi des frères plus autonomes pour éviter de faire une structure trop « lourde ».

Notre concours a été, à nouveau, sollicité en juin 2020 pour les aider à construire ce projet. Il s’agissait de garder le principe d’une communauté à taille humaine (20 maxi) et de mettre en place un service médico-social autonome permettant de séparer ce qui est de l’ordre du médical, de l’intimité, de ce qui relève du fonctionnement de la communauté.

Pour atteindre ces objectifs, il est fait appel, comme dans les autres prieurés, à des aidants et à des soignants extérieurs dans la logique d’un accompagnement à domicile, mais en plus, le dispositif est renforcé par l’emploi à temps partiel d’une infirmière coordinatrice et d’une assistante sociale au moins dans la période de lancement.

Durant les 6 premiers mois de montée en charge, le prieuré de Rennes a d’abord accueilli des Frères en provenance de 2 autres prieurés qui ont dû fermer ainsi que des Frères en situation de dépendance d’autres communautés.

La nouvelle communauté Rennaise atteint actuellement un effectif de 13, mais avant de passer à 20, la congrégation nous a demandé de les aider à faire un point d’étape sur l’organisation mise en place, les problèmes rencontrés, ce qui a pu être résolu et ce qui serait à améliorer.

Pour ce faire, nous avons réalisé une dizaine d’entretiens (surtout en visio) auprès des acteurs du projet (Responsables de la congrégation, responsables de la communauté, professionnels de l’interne et de l’externe)

Notre rapport de synthèse a mis en évidence de nombreux points positifs illustrant la réussite de cette 1ère phase ainsi que les questions en suspens et les points à améliorer.

Nous l’avons présenté lors d’une réunion des différents acteurs à Rennes et avons esquissé avec eux le scénario d’évolution de ce prieuré ainsi que les perspectives pour l’ensemble de la congrégation. Nous aurons vraisemblablement d’autres interventions à Rennes et dans d’autres prieurés dans les mois à venir.

« En résumé, nous trouvons cette mission délicate mais passionnante. Elle demande beaucoup d’écoute et d’adaptation. Elle nous ouvre à un monde complexe, peu connu et relativement fermé mais qui a pourtant besoin de regards extérieurs pour avancer. Elle nous oblige à chercher avec eux des solutions sur mesure, nous faisons vraiment un travail de « cousu main ».

Avec cette mission, nous sommes pleinement engagés, avec la congrégation, dans une dynamique de partage telle que prônée par le nouveau slogan d’ECTI. »